L’Elysée comme Matignon avaient rêvé à l’essoufflement du mouvement contre la réforme des retraites, à la résignation populaire. Ils voulaient laisser derrière eux cet épisode qui marquera à jamais le quinquennat, l’acte 2 macronien, qui selon tous les commentateurs, quelle que soit la diversité des opinions, aura fort mal commencé. Emmanuel Macron et Élisabeth Borne pensaient que le temps ferait son travail, c’était sans compter la détermination des organisations syndicales, dans l’unité, et le dégoût populaire vis-à-vis d’un régime en bout de course quatre ans avant la fin du mandat.
Les français ne pardonnent pas l’autoritarisme et la brutalité du pouvoir, sa surdité et son isolement. Ils l’ont une nouvelle fois montré le 1er mai, à l’occasion de la fête internationale des travailleurs. Un 1er mai pas tout à fait comme les autres, puisque historique ! Plus de 2 millions de personnes dans les rues de France, du jamais vu depuis 2002 contre l’arrivée du patriarche Le Pen au second tour de la présidentielle de la même année, une prochaine journée de mobilisation aura lieu le 6 juin.
Par ailleurs le conseil constitutionnel n’a pas validé la deuxième proposition de référendum déposée par la gauche.
La situation politique est de plus en plus inédite, l’exécutif n’a pas de majorité parlementaire, le mouvement social dure et pourrait se radicaliser, l’opinion publique, sondage après sondage, confirme le désaveu des français pour leur chef de l’État. À défaut de la remplacer, E.Macron a sommé sa première ministre d’élargir sa majorité relative mais à qui ? Pour éteindre l’incendie qu’il a lui-même allumé, il a proposé de rouvrir le dialogue avec les syndicats, de poser, ces 100 prochains jours, les bases de la réconciliation nationale, mais personne n’est dupe. Une stratégie de communication n’effacera pas les gifles assénées depuis bientôt quatre mois. Et rien ne sert de fixer comme priorités des prochains mois l’emploi, la réindustrialisation, la transition énergétique ou de se découvrir une soudaine vocation pour les services publics, car plus personne n’y croit, même dans son propre camp. Tout le monde aura compris que le projet de société macroniste était avant tout au service des profits de quelques-uns, au service des marchés financiers, du Medef, du grand capital et de la domination politique de la bourgeoisie.
Les quatre prochaines années vont être difficiles « le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde » ? L’extrême droite est à l’affût et espère bien tirer avantage de la désespérance populaire. À moins que la gauche n’ouvre un nouveau chemin, celui de la confrontation capital/travail, celui du progrès social et écologique, celui capable de rassembler une majorité populaire pour construire une société résolument libre, égalitaire et fraternelle.