Les prévisions de recettes fiscales formulées l’année dernière par le ministère de l’économie et des finances ont été sous-évaluées. En effet, le déficit atteint les 5.5 % du Produit Intérieur Brut de la France, alors que Bruno Le Maire, ministre en place depuis 2017, tablait sur 4,9 %. Un sérieux dérapage de 16 milliards d’euros, dont la seule responsabilité incombe au ministre, chantre de la rigueur budgétaire sur les plateaux de télévision où avec un ton grave, il aime s’accrocher à ses vieilles recettes économiques ultra-libérales, mais surtout exècre en public l’idée même de l’imposition des revenus des foyers les plus aisés et ceux du capital. Il a moins de scrupules lorsqu’il s’agit de la TVA ou lorsqu’il double le forfait médicaments.
Il est le théoricien du ruissellement. Ce ruissellement qui trouve sa source dans la baisse des impôts sur le capital et les revenus, sensé alimenter le pouvoir d’achat des Français et les investissements productifs. Tout ce funeste récit est raconté dans le nouveau livre de Bruno Le Maire intitulé Une voie française. En pleine crise économique, le ministre a trouvé le temps d’écrire un manuscrit Thatchérien, sous forme de programme présidentiel, pour annoncer une nouvelle cure d’austérité, un terme qu’il nie. Une énième réduction de dépenses publiques, 10 à 20 milliards cette année et qui pourrait atteindre les 50 milliards les années suivantes.
Dans la ligne de mire : les services publics et les dépenses sociales, une nouvelle fois. Bruno Le Maire, enfant de Neuilly-sur-Seine, arpente les cabinets ministériels et les lieux de pouvoir depuis près de vingt ans mais a décidé d’être dans le déni. Il occulte la crise dans l’Éducation nationale, dans notre système de santé, dans la recherche publique, dans la culture et dans les finances des collectivités locales. Autant de services publics nationaux et locaux qu’il a dépecés pour enrichir ses voisins des quartiers chics.
En ploutocratie, il est plus facile de s’en prendre aux privés d’emploi qu’à Bernard Arnault. Sur RTL, le très médiatique ministre déclarait « ça ne peut plus être open bar », se référant aux dépenses de l’État et au soit-disant « tout gratuit ». Rien n’est gratuit ! Mais depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir en 2017, les forces de l’argent se servent. La bourse se porte très bien et le patrimoine des plus riches a explosé. Pour s’en convaincre, 68 milliards de dividendes ont été versés aux actionnaires du CAC40 en 2023 et ces mêmes entreprises ont réalisé 153 milliards de bénéfices nets au 31 décembre. Du jamais vu ! D’autant plus que la forte inflation vécue par les français et les européens depuis 2022, trouve pour seule explication gouvernementale la guerre en Ukraine et l’instabilité qu’elle provoque sur les marchés. Si ce conflit peut expliquer une part de la hausse des prix sur des matières premières, la raison principale de la crise des prix est ailleurs. Comment ne pas mettre en corrélation le niveau des prix et les résultats des grandes entreprises ? Et pourquoi le gouvernement s’obstine à refuser de gonfler le budget de l’État par la contribution des revenus du capital ?
En vérité, au prétexte du déficit public, le gouvernement veut aller plus loin dans la casse des services publics et des droits sociaux. Ce faisant, il veut mettre un terme au modèle social français, poursuivre la fuite en avant vers un modèle anglo-saxon basé sur l’individu, sans système de protection sociale solidaire digne de ce nom. N’est-ce pas ce que demandent les compagnies d’assurances et les banques, les écoles et instituts privés ou les grands groupes industriels ?
La situation budgétaire de la France est un aveu d’échec économique pour le macronisme et dans nombre de pays, des erreurs de trajectoires semblables auraient entraîné la démission du ministre des finances. Mais, avec la droite macroniste ou sarkozyste, quand le Palais Brogniart va, tout va. La campagne des élections européennes devra permettre de confronter chaque projet de société. Dans ces débats, les communistes seront résolument pour une Europe du progrès social et humain.